LA TRAVERSE DE SAINTE-ANGÈLE-DE-LAVAL
20 décembre 2020 Laisser un commentaire
C’est le 19 septembre 1868 qu’est proclamée l’érection canonique de la paroisse de Saint-Angèle-de-Laval. Dès sa fondation, l’activité économique de cette dernière se distingue des autres paroisses agricoles environnantes en raison de sa proximité avec le fleuve Saint-Laurent. Il s’y développe une pêche commerciale qui, de génération en génération représente la principale source de revenue pour plusieurs familles de l’endroit. De plus, sa situation en face de Trois-Rivières favorise la communication et les échanges entre les deux rives. Grâce au pont de glace en hiver et les barques en été, la traversée de la voie fluviale demeure praticable en toute saison. Afin de favoriser une meilleure communication entre les deux rives et transporter plus de passagers, un service de traversier voit le jour en 1853. C’est le « Charles-Édouard », bateau à vapeur propriété de Charles Bourgeois qui assure ce premier service. D’autres suivront par la suite. Citons, entre autres, le Laval, le Sorel, le Glacial, premier bateau-passeur à hélices capable d’affronter les glaces, le Bourgeois, le Progrès, rebaptisé Lavérendrye et le Radisson.
Rappelons qu’au 19e siècle, les périodes de gel ou dégel et les tempêtes imprévues rendent la traversée du Saint-Laurent parfois fort périlleuse. Entre les années 1866 et 1896, le Journal des Trois-Rivières rapportent plusieurs incidents survenus au cours de cette période. Ces anecdotes témoignent néanmoins de l’importance que représente la traverse de Sainte-Angèle pour la vitalité économique de la région. De même que le courage et les efforts déployés par les principaux artisans pour la maintenir en activité. Le 21 août 1866, un violent orage, accompagné de forts vents et d’une pluie torrentielle, agite le fleuve durant une demi-heure. Le traversier le City, surpris au milieu de sa course, passe alors à deux doigts de périr. À l’approche de l’hiver, on surveille impatiemment la formation du pont de glace qui facilite le passage entre les deux rives. Dans ce contexte, le Journal des Trois-Rivières est heureux d’annoncer le 1er décembre 1873 que : « 3 ou 4 voitures du sud ont traversé le fleuve sur le nouveau pont de glace, samedi dernier. » D’autre part, le retour des traversiers à vapeur est fortement attendu dès l’arrivée du printemps. Suffisamment pour faire la manchette du journal, comme c’est le cas pour le Laval en date du 27 avril 1874, alors que celui-ci s’apprête à quitter ses quartiers d’hiver: « après avoir terminé sa toilette du printemps il a laissé le Saint-Maurice pour prendre la traverse entre Trois-Rivières et la rive sud. » On prévient toutefois les lecteurs que le passage libéré peut à nouveau se refermer et que l’usage des canots de glace demeure nécessaire encore pour un temps. Samedi le 18 décembre 1876, une catastrophe est évitée de justesse alors qu’une violente tempête éclate subitement : « 3 canots remplis de voyageurs arrivés par le train d’Arthabaska se trouvaient au milieu du fleuve. Ils disparurent en quelques instants au milieu du brouillard et on les crut perdus. Le fleuve était couvert de vagues énormes qui se brisaient contre les gros blocs de glace flottant. Les hardis canotiers luttèrent avec courage contre la tempête et parvinrent à atteindre la rive nord tous sains et saufs… Le capitaine Bourgeois qui conduisait le canot des malles arriva le premier à la pointe du Cap-de-la-Madeleine. Les embarcations étaient à demi remplie d’eau et les voyageurs trempés jusqu’aux os. » Le pont Laviolette, inauguré en décembre 1967, met un terme à la grande époque de la traverse entre Trois-Rivières et Sainte-Angèle-de-Laval. Grâce à lui, on franchit aujourd’hui le fleuve en quelques minutes sans trop s’en rendre compte. On le prend un peu pour acquis, mais on réalise vite son importance primordiale les rares fois où les autorités doivent procéder à sa fermeture temporaire.
Références :
Fonds Albertus Martin, F277/M197/15
Fonds Société d’Histoire Régionale de Nicolet, F238/E12/34
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