LE CAPITAINE JOSEPH DUVAL

Au mois de juin 2022, la ville de Nicolet procédait à l’inauguration officielle du quai du Port-Saint-François récemment rénové. La mairesse, Geneviève Dubois, profita de l’occasion pour en divulguer le nouveau nom soit: le quai Joseph Duval. Cela, en mémoire du célèbre capitaine qui vécut une grande partie de sa vie au Port-Saint-François où il exerça le métier de navigateur.

Joseph Duval, qui naît à Yamachiche en 1814, se retrouve sur la rive sud à Baie-du-Febvre en 1845 où il opère un commerce tout en pratiquant la navigation. En 1854, il acquiert une propriété en bordure du fleuve au Port-Saint-François où il s’installe définitivement. On décrit sa demeure érigée près du quai en ces termes : « une grande maison blanche à l’air seigneurial avec nombreuses dépendances au milieu de bosquets et jardins magnifiques et qui en faisait un site incomparable. » Propriété qui sera complètement ravagée lors de la terrible débâcle de 1865 et qui contraint le capitaine à s’éloigner du fleuve et s’installer plus haut, sur le chemin du Roy.

Il entreprend sa carrière de capitaine de bateau à vapeur en naviguant sept ans pour le compte d’Augustin St-Louis. Il devient ensuite actionnaire pour la compagnie du lac Saint-Pierre qui fusionnera plus tard avec la compagnie du Richelieu qu’il continue de servir jusqu’au jour de sa retraite. Toute sa carrière durant, il demeure un navigateur hors-pairs qui connaît tous les passages dangereux et tous les écueils qui rendent la navigation sur le fleuve si délicate. De plus, il sait affronter les épreuves avec courage et abnégation comme l’indique un article publié dans La Minerve du 17 juin 1850. Quelques jours auparavant, une terrible tempête occasionne de nombreux naufrages sur le lac Saint-Pierre mettant la vie de plusieurs personnes en péril. L’article nous révèle que le capitaine Duval, à bord de son navire baptisé Mouche à Feu, n’hésite pas à braver les éléments au risque de sa vie pour secourir les malheureux naufragés : « Il s’est mis plusieurs fois en péril ainsi que son vaisseau pour sauver les malheureux que le gouffre menaçait d’engloutir à jamais. Sans sollicitation et sans espoir de récompense, mais par un pur motif d’humanité ne cessa, du moment que la tempête le lui permis, de recueillir tous les hommes qu’il put trouver cramponnés à des débris de leurs radeaux. Le capitaine Duval a mérité à juste titre la reconnaissance d’un public sensible et l’attention du gouvernement pour son humanité aussi désintéressée qu’héroïque. »

Tout au long de sa carrière, plusieurs articles ou entrefilets sont consacrés à Joseph Duval dont l’expérience et l’affabilité et ses allures de franc navigateur ont conquis l’estime et la reconnaissance des voyageurs. Toutefois, c’est probablement cet éloge signé par plus de 80 personnes et publié dans le Journal des Trois-Rivières du 14 décembre 1869 qui lui rend le plus grand hommage : « Nous soussignés, passagers à bord du vapeur Trois-Rivières à son dernier trajet de la saison 1869 vous prions de respectueusement de vouloir bien agréer nos plus sincères remerciements pour la courtoisie et l’affabilité avec lesquels nous avons toujours été accueillis à votre bord, par vous-mêmes ainsi que tous les officiers sous votre commandement. Nous sommes heureux aussi de vous offrir nos plus cordiales félicitations sur l’habilité et le dévouement que vous avez toujours apporté dans l’exécution de vos devoirs, tant vis-à-vis du public que de la Compagnie du Richelieu aux succès de laquelle votre expérience et votre popularité ont puissamment contribué. Nous sommes tous unanimes à entretenir l’espoir que vous resterez encore plusieurs années le commandant du confortable et élégant vapeur Trois-Rivières. »

Le capitaine Duval, dont la santé décline, abandonne la navigation à l’âge de 67 ans : « les passagers apprennent la nouvelle de sa retraite avec autant de regrets que la compagnie du Richelieu elle-même. Le vieux capitaine a cependant droit à son repos et il n’est que trop juste de lui accorder ». Voilà en quels termes les journaux annoncent la retraite du capitaine Duval. Ce dernier continue de demeurer à Nicolet où il pratique le jardinage et s’occupe des 1400 pieds de vigne qu’il a commandé à un vignoble de Pointe-Claire. Il décède en 1901 à l’âge honorable de 87 ans.

Texte : Serge Rousseau pour le CAR Séminaire de Nicolet

Références : Fonds Seigneurie de Nicolet F001/C25/3/41, le Journal des Trois-Rivières du 14 décembre 1869, La Minerve du 17 juin 1850, l’Ère nouvelle du 18 avril 1864, Collection Nicolet C026/K5/4

Port-Saint-François vue du lac Saint-Pierre C270-B1-2-92
La Vapeur Castor du capitaine Duval 1856

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